La Louve-Guérisseuse
Le Roi Tomas et la Reine Parisa étaient toujours sur l'estrade et se tenaient dans les bras l'un de l'autre, en regardant tristement la Lune. Parisa eut un sanglot, Tomas lui embrassa doucement le front. Leurs amis étaient autour d’eux pour les soutenir.
Puis le même faisceau redescendit de la Lune et Mélina apparut.
La meute haleta, la louve alla vers Tomas et Parisa. Mais le Roi poussa sa compagne derrière lui et grogna. La louve gémit et des larmes se mirent à couler sur son poil soyeux. Elle s’assit et attendit.
-Tomas, laisse-moi passer, je ne vois rien. Cria Parisa, en le poussant.
Il étendit un bras et lui barra la route.
-Non, nous ne connaissons pas ce loup.
Elle continua à se débattre et put apercevoir la louve, puis sourit.
-C’est Ellie, ne reconnais-tu pas le regard de ta fille ?
La louve remua la queue et sauta sur place quand sa mère la reconnut et vint vers elle.
-Tu es belle, s’écria Parisa en la serrant dans ses bras.
Puis, elle s’écarta et la détailla du regard.
-Mais qu’est-ce que c’est, demanda-t-elle en montrant la lune en or gravée sur son front. Il faut que tu nous racontes. Tu peux revenir ?
Tomas demanda une couverture. Aussitôt, la transformation commença et Ellie revint. Le Roi la couvrit tout de suite en grognant et Parisa la prit dans ses bras.
-Maman, écoute bien.
Parisa fit ce que sa fille lui demandait.
-Papa et toi, vous êtes des Loups-Esprits, moi, je suis un Loup-Guérisseur, je combats le mal sous toutes ses formes et je vais aussi devenir une grande guerrière.
-Mais… Firent les deux parents ensemble.
Ellie se mit à rire.
-Oui, la déesse de la lune a mis son doigt sur ma bouche et m’a dit qu’à partir de ce moment, je parlerais comme un enfant de mon âge. Elle m’a dit encore plein de choses qu’il faut que je vous dise.
Pendant que Parisa rentrait avec sa fille, le Roi parla à sa meute.
-Demain matin, soyez tous là. Nous vous raconterons ce qu’il y a à savoir.
-Pouvons-nous nous joindre à vous ? Demanda Grégory
-Bien sûr. Allons dans le salon. Parisa est montée avec Ellie pour l'aider à se rhabiller, elles ne vont pas tarder.
En effet, elles arrivèrent rapidement, Ellie alla s’asseoir sur les genoux de son père et sourit à tout le monde.
Le Roi fronça les sourcils.
-Vous le sentez tous, où il n’y a pas que moi ?
-Si c’est de l’aura d’Alpha qui irradie de cette petite fille, dont tu parles. Je crois qu’il ne passe pas inaperçu, reconnut Grégory.
Ellie émit un petit rire.
-Oui, ma louve est une Alpha.
Elle se retourna vers son père et d’un air très sérieux lui dit.
-Mais c’est toujours toi et maman qui commandez. Moi, je suis votre fille.
Ils sourirent à sa déclaration, puis elle raconta tout ce que Sélène lui avait dit.
-Ok, nous ne sommes plus les seuls Loups-Esprit, dit Parisa.
-C’est un peu mystérieux quand elle dit que certaines questions vont se poser quand elle rencontrera son compagnon, déclare Mikaël.
Parisa réfléchit.
-C’est vrai…
-Ça, nous verrons le moment venu, elle n’a que treize ans, grogna le Roi.
Les autres se mirent à rire devant sa mine renfrognée.
-Je pourrais commencer l’entraînement demain ? Sélène m’a dit que je devais commencer à m'entraîner tout de suite pour rapidement devenir une grande guerrière.
Parisa sourit et lui dit.
-Si ton père veut bien, nous commencerons demain, toutes les deux.
-C’est une enfant, bougonna le Roi.
-J’ai commencé l’entraînement plus jeune.
-Ok, soupira-t-il.
Ellie lui mit les bras autour du cou.
-Sélène m'a dit que mes armes seront l'arc et les flèches, mais aussi les poignards. Qui va pouvoir m'apprendre ?
-J’en ai fait quand j’étais jeune, annonce Ruby. Je pourrai peut-être t’aider.
-D’accord ? Demande la petite à Tomas.
Il sourit et hocha la tête.
-D’accord.
Dès le lendemain, Parisa entraîna Ellie, qui se montra très à l'écoute et très douée. En rentrant de l’entraînement, Ellie vit une infirmière sortir de la salle de conférence.
-Maman, je voudrais aller voir les Omégas.
La Reine soupira.
-Je ne sais pas mon trésor, ce n’est pas un joli spectacle.
-J’ai vu quand elles ont été emmenées dans les camions, tous les hommes étaient tristes. Mais je veux vraiment les voir.
-Ok, mais si c’est trop dur pour toi, tu dois me le dire et nous sortirons.
-Promis.
Parisa la prit par la main et elles rentrèrent dans la salle. Une vingtaine de lits avaient été installés. Dans chacun, une Oméga était en train de se remettre sur pied. Elles étaient encore toutes sous leur forme lupine. Ellie s’approcha d’une d’elles qui leva la tête pour la regarder. La petite lui sourit et avant que sa mère ne puisse intervenir, elle s’assit doucement sur le bord du lit et caressa l'Oméga avec d’infinies précautions. La petite louve lui lécha un petit peu la main, Ellie regarda sa mère en souriant. À ce moment, des bruits caractéristiques de changement se firent entendre. Elle sauta du lit et vit la petite Oméga reprendre forme humaine. Parisa se mit devant sa fille pour la protéger, ne sachant pas comment cette jeune fille allait réagir. Une infirmière lia le Doc, qui arriva rapidement.
-Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Demanda-t-il.
-Ellie s’est assise à côté d'elle et l'a caressée. Dans les instants, qui ont suivi, elle a changé.
La jeune fille devait avoir vingt ans et regardait autour d’elle d’un air hagard et craintif.
-Bonjour, je suis le Doc, comme on m'appelle ici. Vous rappelez-vous votre nom ? L’interrogea le médecin.
-Oui, je m’appelle Ingrid. Mais où est-ce que je suis ? Demanda-t-elle, en tremblant de peur.
-Nous sommes dans la meute royale.
Ingrid fronça les sourcils et sembla réfléchir.
-La meute Royale ? Mais cela fait longtemps que nous n'avons plus de Roi.
-Avez-vous des souvenirs ?
Ingrid réfléchit.
-Oui
-Pouvez-vous me raconter les derniers souvenirs qui vous reviennent en tête ? Lui demanda-t-il.
-Oui, comme à chaque fin de week-end, j'ai quitté la maison de mes parents pour rejoindre l’université. Un de mes pneus a crevé et quelques minutes après, un homme s’est arrêté et m’a proposé son aide. Après, je suis ici.
-Vous rappelez-vous la date ?
-Oui, nous sommes le vingt-quatre mars deux mille dix-huit.
Le Doc se tourna vers la Reine.
-Ingrid, je suis Parisa, la Reine et voici ma fille, la Princesse Ellie. Vous vivez encore avec vos parents ?
-Oui.
La douleur passa sur son visage.
-Ils doivent s’inquiéter, puis-je les appeler ?
-Donnez-moi leur numéro, je vais d'abord leur parler et vous les passer ensuite.
-Pourquoi ?
Parisa considéra le Doc. Il inspira et hocha la tête.
-Ingrid, vous avez disparu cinq ans, nous sommes en deux mille vingt-trois.
Les lèvres de la jeune femme tremblèrent. Ellie s'assit à côté de la jeune fille et lui prit la main.
-Mais... Mais où étais-je tout ce temps ?
-Vous avez été enlevé et drogué. C’est pourquoi vous ne vous rappelez rien et que je veux parler en premier à vos parents pour les préparer à la nouvelle.
Ingrid, bien que bouleversée, hocha la tête puis donna le numéro de téléphone de son père ainsi que son nom de famille et de sa meute.
La Reine appela.
-Monsieur Osmond ?
-Lui-même.
-Parisa Castelli à l’appareil.
-Attendez, votre nom me dit quelque chose, mais je ne vous situe pas.
-Je suis la Reine des Lunas.
Il y eut un silence au bout de la ligne.
-Madame, je suis désolée, mais je n’ai pas de temps à perdre…
-Stop. Vous avez une fille qui s’appelle Ingrid, n’est-ce pas ?
L'homme se mit en colère.
-Arrêtez, ma fille a disparu depuis presque cinq ans, vous êtes cruelle de jouer avec ça. Ma compagne et moi souffrons tous les jours de son absence.
-Je n’en doute pas, monsieur Osmond. Cependant, nous avons retrouvé votre enfant, elle est actuellement sur les terres de la meute royale. Je vous la passe.
Il y eut un silence au bout de la ligne. Parisa tendit le téléphone à Ingrid.
-Papa ?
-Ma déesse ! Ingrid ! C’est vraiment toi, ma fille ? Pleurait l’homme.
-Oui, papa. J’ai été enlevée et droguée. La dernière chose dont je me rappelle, c’est d’être reparti pour l’université, puis je me suis réveillée ici. Papa, viens me chercher. Pleurait aussi la jeune fille.
-Je vais chercher ta mère et nous arrivons dès que possible.
Le Doc se tourna vers la Reine et lui dit.
-Elle ne peut pas encore voyager.
Parisa demanda le téléphone. Ingrid lui tendit.
-Monsieur Osmond, votre fille doit être soignée encore quelque temps avant de pouvoir voyager. Mais nous sommes prêts à vous loger ici le temps qu’elle soit sur pied.
-Merci beaucoup, votre Majesté, je suis désolée de ne pas vous avoir cru. J'accepte volontiers votre offre.
-Il n’y a pas de mal, j’aurai réagi de la même façon. Nous vous attendons.
Ellie sauta dans les bras de sa mère.
-Tu crois que c’est moi qui l’ai aidé à guérir ?
-Non, je ne le crois pas. J’en suis sûre, mon trésor.
-Je vais caresser les autres aussi, dit-elle, en se précipitant.
-Non, cria le Doc.
Ellie se réfugia tout de suite derrière sa mère.
-Doc ! Grogna la Reine.
Il baissa la tête devant sa Reine et se pencha vers elle.
-Veuillez me pardonner, votre Altesse. Mais une par jour, si vous le voulez bien. Il faut qu'aujourd'hui, je ne m’occupe que d’Ingrid, vous comprenez ?
Ellie lui sourit.
-Je comprends, je peux revenir demain alors ?
Il éclata de rire.
-Oui, je vous attends à la même heure.
Heureuse, Ellie prit Parisa par la main et elles coururent vers le Palais. En entrant dans le bureau de Tomas en trombe, elles surprirent tout le monde, au point que leurs yeux étaient déjà les yeux de leur loup.
Le Roi grogna contre sa compagne et sa fille.
-Mais enfin, pourquoi entrez-vous dans le bureau de cette façon ? On aura pu vous blesser.
Ellie sauta dans les bras de son père et l’embrassa sur la joue.
-Pardon, mais nous étions trop pressées de te raconter. Tu sais comment m’a appelé le Doc ?
-Non. Mais je sens que tu vas me le dire. Lui répondit-il en souriant.
-Il m’a dit, votre Altesse, déclara-t-elle, toute excitée.
-Ce n’est pas pour ça que nous sommes là, ma chérie. Lui rappela Parisa, en secouant la tête.
-Ah oui, j’ai caressé une des Omégas, elle a changé. Ses parents viennent la chercher.
Tout le monde la félicita. Tous les jours, elle fit la même chose avec une Oméga. Certaines, comme Ingrid, retrouvèrent leurs parents ou leur compagnon. Mais d’autres avaient été vendues soit par leurs parents, soit par leur Alpha. Ces dernières furent accueillies par la meute Royale et ceux qui les avaient vendues furent punis. Étant donné qu’aucune d’elles ne se souvenait d’avoir été enceinte, des tests ADN furent effectués pour savoir à qui les enfants appartenaient. Sans qu'elles le sachent, leurs familles furent mises au courant. Mais tous refusèrent de les accueillir dans leur famille, car ces enfants étaient la preuve de la souffrance de leur fille. Seules, deux des Omégas qui avaient été vendues prirent leur enfant et restèrent dans la meute Royale.
L’automne était presque à sa fin, les premières neiges commençaient à tomber, rendant plus difficiles les recherches de meutes rebelles, voire impossibles pour les traqueurs. Comme tous les hivers dans ce coin du pays, la neige tomba abondamment. Ils attendirent donc le printemps pour reprendre leurs traques.
Mais pour Ellie, peu importe le temps qu’il faisait, elle s’entraînait. La peau parfois rouge de froid, elle ne voulait pas arrêter. Elle travaillait son agilité, mais aussi ses aptitudes au combat. Pour Mélina, les entraînements n’étaient que formalité, cette louve était une combattante féroce.
Au printemps, Ellie courait avec sa mère dans les bois. Parisa était sous sa forme lupine et Ellie sous forme humaine. Elle prenait appui d’arbre en arbre, se lançait dans des sauts impressionnants. Petite et souple, son corps se prêtait bien à ce genre d’exercices. Elle courait aussi très vite, arrivant à tenir la distance avec Parisa quand elle courait normalement. Elle sautait et s’attrapait aux branches. Sa mère était fière des progrès qu’elle avait faits en si peu de temps.
Tomas et Nikola lui avaient fabriqué des cibles mouvantes pour s’entraîner au tir à l’arc. Et Mikaël, qui était doué pour la technologie, lui fabriqua un arc pliable qui s’ouvrait d’une main. Il ressemblait à celui d’Hawkeye des Avangers. Il fabriqua aussi des flèches à tête explosives. Quand Ellie le vit, elle ne touchait plus le sol, tant elle sauta de joie sur place. Grâce à un harnais, elle pouvait le ranger dans son dos et le sortir rapidement. Au début, Ellie n’arrivait pas à ouvrir l’arc d’un seul coup et s’énervait, provoquant le fou rire de Nikola qui, lui, y arrivait du premier coup. Il la taquina beaucoup sur le sujet. Mais il y avait une chose que seule Ellie pouvait faire, c'est trouver ses armes, parce que dès qu'elle les enlevait de son corps, elles disparaissaient à la vue des autres. C'était sans doute une volonté de la Déesse de la Lune, pour que quand elle se changeait en loup, alors qu'elle les portait, personne ne puisse s'en emparer.
Un soir, dans le salon, ils regardaient tous un film. Parisa regarda sa fille et se pencha vers Tomas.
-Ellie a bien grandi pendant l’hiver. Elle a pris facilement dix centimètres.
-Tais-toi, je l’ai bien vu, grogna-t-il. Tout va trop vite. Les jumeaux marchent et parlent. Ellie vient d’avoir quatorze ans et certains loups la regardent d’une telle façon, que j’ai envie de leur arracher la gorge. C’est ma petite fille.
Il se tourna vers sa compagne et dit sérieusement.
-Peut-être faudrait-il lui acheter des vêtements plus larges.
Parisa se mit à rire.
-Je verrai. En tout cas, il faut lui racheter des vêtements. Nous irons demain après l’entraînement. J’emmènerai les filles avec moi.
-Ok, soupira-t-il. Ses progrès à l’école sont remarquables.
Puis, il sourit et dit fièrement.
-C’est notre fille, c’est normal.
La Reine entoura ses bras autour du Roi, en souriant de bonheur.
Corrie s’approcha.
-Je t’ai entendu, je peux me joindre à vous, demain ? Demanda-t-elle, avec son bébé dans les bras.
Elijah avait un mois et grandissait à vue d’œil. La Reine sourit.
-Bien sûr, il y a longtemps, que tu n’es plus sortie avec nous.
-Génial, je laisserai Elijah à Louis, il aime beaucoup s’occuper de son fils. Bon, je vais monter le mettre dans son lit, à demain, chuchota-t-elle en voyant son bébé endormi.