00 - Une étrange légende
Not your Barbie girl, I’m livin’ in my own world
I ain’t plastic, call me classic
You can’t touch me there, You can’t touch my body
Unless I say so, ain’t your Barbie, no
Not Your Barbie Girl - AVA MAX
Il me dévisage de haut en bas et je perçois de la déception dans son regard.
— Pourquoi ne peux-tu pas être comme ta sœur ? Dit-il en soupirant.
Encore et toujours cette phrase.
Avec le temps, j’aurais dû m’y habituer. Malheureusement, je n’ai pas encore cette force. Je soupire bruyamment, ne prenant pas la peine de lui répondre, et fais demi-tour.
— Attends ! Dit-il en posant sa main sur mon épaule.
Je la repousse violemment et me retourne. Même si je suis habituée à ces mots, je ne laisserai pas un inconnu me les dire et me toucher sans mon consentement.
— Je ne te connais pas, et je t’interdis de me toucher.
Cette fois, je pars d’un pas décidé.
Impossible de passer une journée tranquille dans ce royaume.
Si j’avais eu la moindre attirance pour cet homme, elle a maintenant disparu. C’est toujours la même rengaine, ne peuvent-ils pas simplement s’adresser directement à ma sœur ?
Feindre une amitié, voire plus, avec moi, c’est à la limite de la décence. Une personne avec une attitude aussi méprisable ne mérite pas de fréquenter ma sœur.
Je préfère tout de même la laisser gérer ses prétendants toute seule.
J’arrive au palais et me dirige rapidement vers ma chambre avec l’espoir de ne croiser personne. Je m’allonge sur mon lit et fixe le mur pendant que le temps s’écoule lentement.
Cette année, je vais devoir entrer à l’académie royale. Je n’ai pas l’intention de me battre contre ma sœur pour le trône. Elle a un an de plus que moi, ce qui en fait l’héritière légitime de la couronne. Malgré cette certitude, tous les héritiers sont tenus d’y entrer pour trois ans dès lors qu’ils ont atteint l’âge de vingt ans. Je n’ai rien contre l’académie, mais je pense que ma vie peut très bien se dérouler sans elle. Passer inaperçue est un luxe que je perdrai en y entrant.
J’ai tout fait pour ne pas me mettre en avant, au point que certaines personnes oublient que le royaume de Dhyato a deux princesses. Je devrais aussi remercier ma sœur pour cela. Son attitude soignée et douce accapare toute l’attention.
C’est la princesse bien-aimée du royaume. Celle qui sera couronnée lorsque mes parents abdiqueront. Je ne veux d’aucune couronne, je vais profiter de l’académie pour me détendre pendant trois ans, puis je profiterai de ma vie de princesse cadette.
J’ai déjà conscience que je devrai supporter les comparaisons avec ma sœur, mais je pense que cela en vaut la peine pour avoir une vie future paisible. En vingt ans d’existence, la seule question qui hantait mon esprit était :
Serai-je mentionnée toute ma vie uniquement à travers ma sœur ?
J’ai compris que ce serait le cas, mais en tant que petite sœur, je devrai vivre avec cela. Chaque lumière a besoin de son ombre, après tout.
On toque à ma porte, me sortant de mes pensées.
— Entrez !
La tête de ma sœur apparaît dans l’embrasure de la porte. Elle agite un paquet de guimauves et je l’invite rapidement à prendre place près de moi. La soirée potins va commencer !
Depuis que ma sœur est entrée à l’académie l’année dernière, nous n’avons pas pu passer de temps ensemble. Alors dès qu’elle rentre à la maison, nous passons nos soirées toutes les deux.
Je tresse ses longs cheveux crépus noirs, quand elle interrompt ma concentration.
— J’ai récemment entendu parler d’une légende qui existe depuis des années à l’académie.
Elle attire mon attention, je relève la tête vers elle intriguée et croise son regard dans le miroir.
— On raconte qu’une importante lignée royale de loup-garou envoie ses descendants à l’académie depuis des décennies.
Je me mets à rire :
— J’adore tes histoires Ina, mais ne sois pas bête. Ça n’existe pas, les loups-garous !
— Qu’est-ce que tu en sais ?
— Je n’en ai jamais vu, alors j’imagine qu’ils n’existent pas.
— Tu n’as jamais vu d’ours blancs et ça ne veut pas dire qu’ils n’existent pas pour autant.
Je ne réponds pas.
— Allez, tu ne peux pas me dire que tu ne rêves pas de rencontrer un loup.
— Le loup est mon animal préféré, et même si j’adore la fantaisie, on est dans le monde réel. Les loups-garous n’existent pas !
Elle rigole légèrement.
— J’aime penser que nous ne connaissons pas tout de cet univers.
Je m’écrase sur mon lit. Les loups-garous ?
— Notre monde est trop fade pour que ces créatures majestueuses existent.
— Imaginons deux secondes. Qu’est-ce que tu ferais s’ils existaient vraiment ?
— J’en épouserais un ! J’affiche un air sérieux et déterminé.
Ina ne tarde pas à éclater de rire et je ne peux m’empêcher de la suivre. C’est ainsi que le reste de la nuit se déroule, célébrant nos retrouvailles joyeuses.