When Our Eyes Met

— Je pense qu’il est temps pour moi de partir. Je réajuste mon sac, me munis de ma valise et me mets face à Ambre, Robert et Katy. Ils me regardent un air triste sur le visage.

— Tu es sûre de ne pas vouloir rester ? Tente Ambre une dernière fois.

— Non, le fait de ne pas me souvenir de l’attaque et de rester ici me met vraiment mal à l’aise, je préfère tenter de me reconstruire ailleurs. Mais sachez que je vous remercie du fond du cœur pour avoir pris soin de moi ces derniers mois. Je les prends tour à tour dans mes bras tandis qu’Ambre et Katy laissent couler des larmes.

— Sache que tu pourras revenir à tout moment, tes parents ne sont plus là, mais nous sommes encore là pour toi. Viens vers nous autant de fois que tu le veux, que tu te sentes mal ou très heureuse. Me dit Robert à son tour les yeux brillants.

Je me force à ne pas pleurer aussi. J’ai l’impression de quitter ma seule famille.

— Donne-nous de tes nouvelles le plus de fois possible et appelle nous souvent d’accord ? Me dit Katy pour finir.

Je leur promets de les contacter le plus souvent possible et sors de la maison me dirigeant vers l’aéroport. Je leur ai demandé de ne pas m’accompagner parce que je sais qu’on ne pourra pas se quitter.

La famille Barris m’a accueillie il y a quelques mois chez eux après le décès de mes parents. Ce sont les meilleurs amis de ma famille depuis presque toujours. Les parents de Katy et les miens sont amis depuis au moins la primaire. Et Katy et moi sommes donc amis depuis notre naissance.

Je me suis réveillée il y a environ cinq mois dans une de leur chambre couverte de sang. J’étais affolée et je ne comprenais rien.

Ils m’ont alors annoncé que mes parents et moi avions été attaqué par une meute ennemie et que mes parents n’ont malheureusement pas survécu. Ils m’ont trouvé dans un état atroce laissé pour morte.

Je n’ai aucun souvenir de cette attaque et ce qui m’attriste le plus et que je ne me souviens plus vraiment de mes parents. Le médecin a supposé que le choc et la peur de l’attaque m’ont laissé des séquelles, au point de tenter d’effacer l’existence de mes parents. Tous mes souvenirs les concernant sont très flous, en particulier leur visage. Étrangement, quand on me parle de ces deux personnes des larmes coulent automatiquement.

Mes émotions et sentiments à l’égard de mes parents sont confus. Je ne sais pas si j’ai l’impression de ne jamais avoir eu de parents, ou si je suis triste de la tournure des événements. Je ressens juste un vide, j’ai du mal à supporter l’idée de ne plus me souvenir d’eux. Mon estomac se retourne de culpabilité. Je ne me souviens pas des personnes qui m’ont nourri et chérie toutes ces années.

J’ai donc décidé de continuer mes études de droit dans une autre ville. Dix-neuf ans semble être l’âge parfait pour prendre son envol. Mes parents étaient le couple alpha. Ils seront remplacés par le couple Barris qui était leurs bêtas. Je ne veux pas assumer ce rôle qui est beaucoup trop lourd pour moi. Je ne pense pas être à la hauteur.

Je veux me souvenir de mes parents, mais j’ai peur de ce qui pourrait ressurgir. Je pense que tenter de m’éloigner un peu du lieu de mes cauchemars me ferait du bien. La ville de Longueway parait assez isolée et calme. Bien que ce soit une petite ville, elle regroupe toutes les choses essentielles qu’une grande ville possède.

⌀⌀⌀

Je récupère ma valise et réserve un Uber. J’ai eu la chance de pouvoir avoir un appartement en résidence étudiante. Je ferai de la colocation, mais vu le prix abordable, je ne pouvais pas rêver mieux. Ayant fait des petits boulots, j’ai pu économiser un peu pour vivre et l’héritage laissé par mes parents pourra m’aider. Je ne vais tout de même pas vivre longtemps avec ça donc je dois me trouver un job à temps partiel. L’avantage à vivre en meute est le fait de ne pas avoir à payer un loyer, c’est la maison de la meute qui prend tout en charge pour ses loups. Mais cette vie est maintenant derrière moi.

Arrivé à destination, j’entre dans le bâtiment qui me présente directement un bureau d’accueil.

Parfait, je ne vais pas me perdre comme ça.

Je me dirige vers un homme assez âgé, je dirais qu’il a environ la cinquantaine passée.

— Bonjour, je m’appelle Layla Sy, on m’a accordé une chambre dans cette résidence.

— Bonjour.

Il me fait un grand sourire et se met à chercher sur son cahier.

— Bien, étudiante en deuxième année, c’est bien ça ?

Je hoche la tête et le suis alors qu’il se lève et se dirige vers les escaliers.

— Les étudiants de deuxième année se trouvent aux deuxième et troisième étages. Ton appartement est au deuxième, porte 2045.

Je hoche la tête et le suis jusqu’à la fameuse porte.

— Je ne peux pas te faire visiter, car ta colocataire est déjà installée, mais comme elle est présente, je lui laisse le soin de le faire .

Je lui fais un sourire comprenant la situation pendant qu’il toque et qu’une fille blonde ouvre la porte toute souriante. Je suis tout de suite intrigué pas ses cils blonds, c’est bien la première fois que je vois cette particularité.

— Bonjour, voici ta nouvelle colocataire, Layla, je te laisse lui montrer votre appartement.

— Bonjour, bien sûr M. Thomson .

Il nous salue et redescend rapidement les escaliers pour retourner à son poste.

— Coucou ! Je m’appelle Émilia Massy enchantée.

Elle se présente avec un magnifique sourire.

Je lui serre la main à mon tour et lui répond le sourire aux lèvres :

— Layla Sy enchantée.

— Je suppose que nous sommes toutes les deux en seconde année de droit ?

Je hoche la tête.

— Super une acolyte de plus.

Je ris à sa remarque et la visite de l’appartement commence.

Nous disposons d’un salon plutôt grand, mignon et bien décoré avec une petite télé, une table basse et un canapé d’environ trois ou quatre place. Le salon est grand, car il donne sur la cuisine ouverte. Des chaises hautes sont disposées pour qu’on puisse manger sur le bar/plan de travail ou encore sur une petite table accompagnée de deux chaises proches de la cuisine. Un salon/cuisine/salle a manger plutôt bien organisé. Elle me montre ensuite la salle de bain qui est composé d’une baignoire, ce qui est vraiment cool pour les soirées détente en tête-à-tête avec moi-même. Elle me présente ensuite ma chambre qui est face à la sienne. Ma chambre est déjà composée d’un lit, d’un bureau et d’une armoire, le reste sera à remplir par moi.

— Alors comment tu le trouves ? Me dit Émilia adossée à ma porte.

— J’adore, c’est super mignon, j’aime vraiment comment l’appart est organisé et je trouve qu’il est vraiment grand pour un appartement d’étudiant. Je suis déjà sous son charme Émilia.

— Tu peux m’appeler Em. Et oui, c’est ce qui est assez cool dans cette ville. Il y a beaucoup de jeunes, donc elle est organisé de manière à ce que les jeunes puissent être indépendant et vivre correctement.

Je souris à l’idée de passer mes prochaines années ici.

— Tu peux m’appeler Lay.

Nous passons le reste de la soirée à discuter de tout et de rien en mangeant. J’apprécie vraiment Em le courant est directement passé entre nous. C’est un coup de foudre amical et ça m’a l’air bien réciproque. Si dans cette ville tout le monde est aussi sympa qu’elle, je vais m’y plaire. Des bonnes ondes ne me feront que du bien.

Je n’ai pas encore dit à Em que je suis une louve, parce que je ne sais pas comment ça se passe ici pour les loups-garous. Peut-être qu’il n’y en a pas, peut-être qu’ils ne sont pas appréciés ici, je préfère garder le secret pour le moment. De plus, je suis sur un territoire qui n’est pas le mien, je suis techniquement une intruse. Il faudrait que l’alpha m’accepte, mais je ne pense pas intégrer une meute, je pense que le mieux pour moi est de m’éloigner des loups. Je vais tout faire pour ne pas me faire remarquer et rester discrète.

Lorsque minuit arrive je préviens Em que je vais me coucher parce que le voyage m’a épuisé. J’entre dans mon lit que je trouve agréablement moelleux et m’endors en pensant à ces deux visages flous mais réconfortants.

⌀⌀⌀

Emilia a décidé aujourd’hui de me faire faire un tour de la ville et de me présenter ses amis. La rentrée n’est que dans quelques jours, ce qui me laisse un peu de temps pour prendre mes marques. On se retrouve toutes les deux dans un fast-food en les attendant. Je panique un peu à l’idée de rencontrer son groupe, je ne suis pas vraiment timide, mais je me sens toujours anxieuse à l’idée d’intégrer un groupe d’amis qui se connaît depuis un moment. Une de mes griffes s’allonge et se plante dans la peau de ma main. Des picotements parcourent mon corps sous cette douleur minime. Je cache mes mains sous la table pour ne pas qu’on remarque ma réaction peu humaine.

Mes gigotements alertent malgré tout Emilia qui place sa main sur ma cuisse.

— Arrête de stresser, je te promets qu’ils sont adorables.

Elle tente avec un sourire réconfortant qui me permet de souffler un peu de soulagement. Une petite boule de stress lutte tout de même pour rester dans le fond de ma gorge.

— Emiliaaa.

Je tourne la tête pour voir une grande fille avec un afro magnifique s’avancer vers nous, accompagner d’un garçon aux cheveux noir corbeau assez baraqué et d’une autre fille plus petite rousse.

— Awaaa. S’exclame Émilia en leur faisant signe de venir s’asseoir.

Awa prend place à ma droite alors qu’Émilia était à ma gauche, le garçon s’assoit en face de moi et la rousse à côté de lui face à Em. Ils avaient tous un sourire bienveillant aux lèvres.

— Je vous présente Layla, elle vient juste de débarquer en ville, et je l’adore déjà. Me présente Em.

Elle poursuit :

— Layla, je te présente Sofia Barns. Dit-elle en montrant la rousse qui m’adressa un sourire. De magnifiques taches de rousseur ornent son visage petit et rond. Elle est adorable. Darren Chen en montrant le garçon qui me sourit aussi à son tour. Ses yeux bridés et sa cicatrice à l’arcade gauche lui donne un charme renversant. Et enfin, Awa, mais je suppose que tu as dû deviner. Awa partage mon teint de peau et je pense être obnubilée par les deux piercings en piques qui décorent sa lèvre inférieure.

Awa lâche un léger rire et me salut de la main. Elle prend ensuite la parole me demandant :

— Alors qu’est-ce qui t’a fait venir dans cette ville si ce n’est pas indiscret.

J’ai un moment d’hésitation, mais lui répond rapidement que je veux changer d’air et que j’ai sentie que c’était le bon moment. Elle hoche la tête à moitié convaincue, ses yeux violets me scrutent comme si elle essayait de lire en moi. Elle n’ajoute rien alors que je ne pouvais que déglutir sous son regard perçant.

Le groupe était très jovial, je me suis tout de suite sentie intégré, ils sont tous adorables et amusants. Je suis contente d’avoir pu tomber sur ce genre de personne aussi rapidement.

J’ai pu cerner un peu leurs caractères, Awa paraissait un peu réservée, mais j’ai rapidement compris qu’elle était drôle et détendue avec ses amis. Darren semblait du type joueur et mesquin, sa cicatrice ne l’aidant pas sur ce point, mais il s’est avéré être assez gentil et doux. Sofia avait l’air plus libre et à l’aise que les autres, et elle est définitivement plus ouverte et entrainante. Que ce soit au niveau de son ouverture d’esprit ou de ses expressions faciales hilarantes, elle confirme ma première impression.

On a continué à discuter pendant quelques heures et je me suis sincèrement bien amusée. Depuis l’accident, je n’avais pas ressenti autant de joie et d’apaisement. Je ne sais pas ce qu’ils m’ont fait, mais je ne veux pas que ces sensations agréables disparaissent. C’est comme si je goûtais des sucreries pour la première fois. Impossible de ne pas recommencer. On est ensuite rentré avec Em et nous avons discuté longtemps avant de nous coucher. En deux jours une routine c’est déjà installée, et je dois avouer que ce n’est pas déplaisant.

J’ai l’impression d’être chez moi, et c’est un sentiment que je n’avais pas connu depuis un moment. Même si Ambre et Robert étaient très gentils et que je les connaissais depuis toujours, je ne pouvais pas me sentir complètement à l’aise. Ils prenaient soin de moi comme si j’étais leur fille, mais je ne pouvais pas m’empêcher de penser que j’étais une gêne pour eux. Leur couple est parfait, ce sont des âmes-sœurs qui se sont trouvés assez jeune, et Katy est née de ce bel amour. Je culpabilisais de casser leur routine et fonctionnement.

Un coin de ma tête aimait tout de même profiter de ce joli spectacle. Les étincelles à chaque fois que leurs regards se croisaient, leur amour inconditionnel. On m’a de nombreuses fois raconté que c’était le cas pour mes parents aussi. Mais je ne sais pas si c’est vrai, enfin, je ne m’en souviens plus.

Je n’ai jamais pensé à rencontrer mon âme-sœur, et il y a tellement peu de chance de le rencontrer que je préfère ne pas y penser. Qu’est-ce que je ressentirai ? Est-ce que tout ce qu’on me raconte est vrai ?

Je ne sais pas si je veux expérimenter cette possibilité un jour. Tout est si compliqué en ce moment, je crois que ça ne ferait que me perdre et me blesser encore plus.

Je soupire à toutes ces pensées qui se déchaînent dans ma tête et tente de m’endormir pour de bon.